Scnack & Waiswisz aux Instants Chavirés - Lieux Communs
Ce concert est pour moi l'occasion de découvrir trois musiciens dont je ne sais pratiquement rien. Sur le plateau, The Hands II, l'instrument inventé par Michel Waisvisz, excite la curiosité. Le travail de Waisvisz implique des méthodes d'actions corporelles sur les sons échantillonnés - mouvements dans l'espace, accéléromètrie, détection dynamique,... Il n'est pas évident de décrire l'apparence de son instrument mais disons que la main s'y enfiche comme dans un gant. Ainsi, les mains déplacées dans le vide comme sur un piano virtuel, Waiswisz active de ses doigts des boutons savamment disposés et dont les fonctions sont méticuleusement répertoriées dans sa propre mémoire humaine qui presque se substituent aux datas confinées dans les mémoires électroniques. On comprend alors pourquoi son ordinateur est éloigné de lui, hors de sa vue. Son étrange regard, qui n'est pas uniquement celui intériorisé de l'écoute, reflète aussi un processing neurologique en action. Paul Hubweber et Uli Böttche quant à eux impressionnent par leur coordination. L'amplification et l'acoustique du trombone sont parfaitement traités dans un rapport de disparition/apparition donnant à maintes reprises à Paul Hubweber la possibilité d'être un acteur d'égale importance dans l'initiation des propositions sonores. Dans l'espace quadriphonique de diffusion les contrôleurs - Waiswisz & Böttcher - MIDI appuyés par LISA s'en donnent à cœur joie, bien souvent dans une débauche de sons éclatés, tronçonnés. Le tromboniste mêle interventions bruitistes à des sections plutôt free jazz ou contemporaines. Le qualificatif de GRM improvisation m'a paru très vite pertinent. Du plus anecdotique au plus chargé de sens aucun son n'est tabou et tous on droit de citation dans la plus stricte tradition de la musique acousmatique. Et dans ce jeu de mémoires cachées, traversent mes oreilles; Bayle, Schwarz & Portal, Parmegiani, j'en passe, et même les sons de Pop Corn, le fameux premier tube de la pop électronique composé par les Pop Corn Makers themselves. Bien souvent après un galop d'essai où les sons très librement sont jetés comme pour une sorte de repérage préalable des possibles, la musique prend très rapidement tournure dégagée de tout complexe. Une dizaine de pièces en deux sets, souvent très vives, denses, ludiques parfois et toujours exaltantes. Il y a dans la manière d'assumer pleinement cette tradition de la musique contemporaine, une parenté certaine avec les plus mémorables réussites de groupes de jazz historique.